Opium noir (9) : Razzia sur la schnouff

Rapport de mission n° 93
Date de la mission: Août et Novembre 1926
Agents :

Ultime épisode de ce qui fut la plus grande enquête de la BMS : les agents coupent les deux extrêmités du réseau criminel.

7 août 1926 : Après trois semaines de voyage sur un navire des liaisons maritimes, les inspecteurs Rodier, de Saint-Véran et Sarraut sont de retour en France à Paris où il font un compte-rendu oral de leur longue expédition et donnent la composition du remède. Les commissaires principaux Fèvre et Conti organisent une réunion de tout le service pour décider de la conduite à tenir. Le commissaire Laspalès, qui a supervisé une surveillance des laotiens dans Paris, pense que Nuran Hmong a dû reconstituer ses filières de production d’opium noir car la drogue continue d’être distribuée.
Après avoir pris l’avis de l’ensemble des agents, les deux commissaires principaux décident d’agir et de procéder à l’arrestation de Nuran Hmong qui continue à distribuer sa drogue à Paris. Charge aux agents de trouver suffisamment de preuves (de la drogue dans un bâtiment qu’il possède, etc...) car il s’est entouré des conseils d’un bon avocat défendant le milieu, Me Mollard. Simultanément après l’arrestation de Hmong, le remède sera proposé aux notables infectés dans la plus grande discrétion, et en les mettant devant le fait accompli que leur fournisseur est en prison et qu’il sera impossible de l’en sortir.

Depuis son retour de Marseille, Laspalès a supervisé la surveillance du laotien par des agents de la BMS qui ont épié toutes ses activités mondaines. Laspalès pense que l’enquête sur ses nouveaux réseaux doit commencer par là pour déterminer quels sont ses nouveaux réseaux. Le rapport détaillé que lui ont remis ses agents montre les faits suivants :

  Nuran Hmong mène une vie mondaine très active, allant régulièrement à Deauville et dans les cabarets ou restaurants très en vue. C’est là qu’il y rencontre du beau monde...
  A plusieurs reprises, il a rencontré un homme à l’accent belge et a longuement discuté avec lui dans des cabarets.
  Il a fait venir un avoué à son domicile, qui travaillait dans une étude notariale parisienne que les agents ont pu identifier.
  Il y a quelques semaines, il s’est rendu à Deauville en compagnie de son garde du corps (un gros asiatique très costaud) et est rentré à Paris en train seul.

Laspalès prend personnellement les choses en main et se constitue une équipe composée des inspecteurs Evrard, Sarraut, Rodier, ainsi qu’une nouvelle recrue nommée Ange Belloni, ancien homme de main de Dante Nardi et vétéran du raid du 28 mai 1926 à la Villa Capri. Fortement choqué par la vue des sombres rejetons de Shub-Niggurath, Belloni a proposé ses services à la BMS pour combattre le surnaturel. Sa candidature a été acceptée, même si on a dû fermer les yeux sur quelques affaires décorant son casier judiciaire...

Laspalès répartit les tâches entre ses hommes pour explorer toutes les pistes. Les évènements se précipitent, car il apprend qu’un agent de la BMS, Alexis Boileau, a disparu ! Ce dernier était en surveillance devant la maison de Nuran Hmong, et c’est son collègue chargé de le relever, Aristide Lamperond, qui a constaté la disparition.

Ange Belloni se rend devant le domicile de Nuran Hmong et relève Aristide Lamperond qui en assure la surveillance. Il a l’impression d’être lui-même surveillé par deux individus du genre « truand parisien » qui sont sur le trottoir d’en face.

Sarraut et Rodier se rendent au domicile de leur collègue et enquêtent chez tous ses proches : il a bel et bien disparu, et n’est pas rentré de sa surveillance nocturne.

Laspalès et Evrard, restés à la BMS, font des recherches et découvrent dans le télégramme de police une affaire très troublante survenue à Deauville il y a quelques semaines, précisément au moment où s’y trouvait Nuran Hmong. Un gendarme, l’adjudant Desnos, a surpris la nuit des plongeurs en scaphandres autonomes en train d’amener sur une plage isolée des caisses à un groupe de contrebandiers. Usant de son arme, il est parvenu à mettre en fuite tous ces hommes, les scaphandriers fuyant dans l’eau. Une partie de la cargaison (une seule caisse) a été capturée.

Ils trouvent également, en se renseignant aux services fiscaux, que Nuran Hmong a récemment acheté un pavillon près de Meudon. D’expérience, Laspalès sait que cette commune est truffée de galeries souterraines dans son sous-sol, en raison d’anciennes mines de craie.

En fin d’après-midi, Laspalès fait le point avec toute son équipe et annonce son départ pour Deauville avec Evrard. Pendant ce temps, il ordonne à Sarraut, Belloni et Rodier d’enquêter sur ces gangsters parisiens qui rôdent autour de chez Nuran Hmong et de tenter d’avancer sur la disparition de leur collègue Boileau.

8 août 1926 : A Deauville, Laspalès et Evrard se rendent à la gendarmerie dont le chef de corps les renseigne sur l’affaire des trafiquants. La caisse saisie se trouve à la gendarmerie et ils constatent qu’elle contient des bocaux de sève noire. Mais, plus étrange, sur un côté de la caisse est incrusté une tablette faite d’un curieux alliage métallique, et sur laquelle sont gravés d’étranges symboles. Ils apprennent que l’adjudant Desnos est à l’hôpital. « Il ne va pas bien depuis cette affaire, sans doute un choc traumatique... » Se rendant dans l’établissement de soins, ils le trouvent alité avec son épouse à son chevet. Elle indique aux agents que son mari fait de puis quelques jours de terribles cauchemars durant lesquels il hurle des insanités et se réveille exténué... Evrard et Laspalès sont d’ailleurs témoins d’un des ses cauchemars dans lequel il ont la surprise de l’entendre crier le nom de Cthulhu ! Réveillé, il semble presque normal quoique exténué. Il répond aux questions de Laspalès en confirmant qu’il a bien vu des plongeurs en scaphandre sortir de l’eau. Laspalès, vétéran de la lutte contre le surnaturel, pense au contraire que le gendarme a vu une quelconque créature surnaturelle qui a atteint sa santé mentale...

A Paris, Sarraut, Rodier et Belloni retrouvent par hasard leur collègue Alexis Boileau qui revient de lui-même dans les bureaux, accompagné par le commissaire Andréani et un de ses adjoints particulièrement bègue. Andréani, de l’anti-gang, surveille un trafiquant belge, Jacques Goedenhals, qui exporte en France de l’opium à partir de la Belgique où la Hollande. Ce belge a rencontré a plusieurs reprises Nuran Hmong, aussi Andréani l’a fait surveiller par ses hommes... Ils ont trouvé Boileau en train de rôder autour de la maison et l’ont pris pour un homme de main du chinois. Le pauvre agent de la BMS s’est retrouvé ceinturé par les hommes de l’antigang et jeté au bloc sans ménagement, malgré ses protestations. Andréani se confond en excuses pour cet incident et demande à Rodier de les transmettre à son collègue Laspalès.

Ce dernier est d’ailleurs grâce au téléphone rapidement mis au courant de la situation. Il raconte aux agents le cas de l’adjudant Desnos et ordonne de faire des recherches sur cette tablette dont il décrit les symboles. Les archivistes de la BMS lui répondent assez rapidement qu’il s’agit d’une tablette servant à invoquer les Profonds, créatures batraciennes familières de la BMS. Toute personne jetant la tablette à la mer se la verra ramenée par des profonds. Elle a aussi pour effets secondaires de provoquer chez son propriétaire de terribles cauchemars dans lesquels il voit le grand Cthulhu !

Fort de ces informations, Laspalès fait détruire la tablette sans la toucher et rentre à Paris avec Evrard, en faisant transférer dans un hôpital parisien l’Adjudant Desnos afin de l’éloigner de la mer et de l’appel de Cthulhu.

L’équipe au complet est de nouveau réunie dans les bureaux de la BMS et fait le point sur l’enquête : Nuran Hmong a bien reconstitué ses filières. Il importe désormais sa sève noire par la mer avec le concours de Profonds, puis de l’opium par la Belgique, avec lequel il doit faire de l’opium noir dans un laboratoire situé dans les sous-sols de sa nouvelle maison de Meudon !

9 août 1926 : Laspalès planifie l’attaque du pavillon de Meudon, où il soupçonne l’existence d’un laboratoire d’opium noir. Il obtient des hommes du commissaire Andréani que ceux-ci surveillent discrètement le pavillon et y arrêtent toute personne qui en sortirait. Pendant ce temps, il passera avec Rodier, Evrard, Sarraut et Belloni par les galeries de l’ancienne mine de craie qui donnent sur une entrée située dans le bois voisin.

Les soupçons de Laspalès étaient fondés : les agents, après avoir déambulé dans des galeries, finissent par trouver de la lumière et un laboratoire souterrain de production d’opium noir ! Tentant de s’approcher discrètement, l’un d’eux fait du bruit et les gardes laotiens qui s’y trouvent donnent l’alerte. Ils sont armés de fusils et un combat s’engage dans le dédale des couloirs de craie. Plusieurs coups de feu sont échangés quand survient un énorme laotien en costume traditionnel qui fonce sur Belloni qui lui tire plusieurs coups de feu, qu’il encaisse sans difficulté, une sorte d’ichor noir coulant de ses blessures qui se referment à vue d’œil ! Il projette violemment Belloni contre un mur et ce dernier tombe inconscient. Puis il s’approche de Rodier qui lui tire dessus avec sa mitraillette Thompson ramenée de Marseille. Le gros encaisse les balles, arrive au contact et assomme « Dédé la mitraille » d’un seul coup de poing. Les autres agents, retranchés derrière un petit mur de blocs de craie, parviennent à mettre hors de combat plusieurs Laotiens qui leur tiraient dessus, au prix de plusieurs blessures. Les armes, par enrayement ou faute de munitions, finissent par se taire... Quand fonce au milieu d’eux le gros laotien ! Il se précipite sur Laspalès qui esquive un coup de poing qui termine dans le mur, laissant un énorme trou. Laspalès crie désespérément à ses collègues de tirer sur ce monstre, mais Evrard et Sarraut, blessés, ne sont pas en état d’intervenir. Les agents encore conscients pensent leur fin arrivée... Mais heureusement Rodier reprend ses esprits, le visage tuméfié. Il crie à Laspalès de se coucher et vide le chargeur de sa mitraillette Thompson sur le gros monstre, qui tombe complètement démembré dans un gargouillis infâme, baignant dans une mare de liquide noir et visqueux. Laspalès, livide, hurle « je suis trop vieux pour ces conneries ! »

La dizaine de gardes laotiens ayant tous été neutralisés, les agents de la BMS prennent rapidement le contrôle du pavillon et saisissent les stocks de drogue qu’ils feront détruire.

10 août 1926 : Après le combat dans le pavillon de Meudon, Nuram Hmong est arrêté et déféré devant la justice par les hommes de la BMS, où il sera condamné à une lourde peine pour trafic de stupéfiants et association de malfaiteurs. Il est également donné l’ordre aux autorités d’Indochine d’arrêter ses parents et complices Khamtay Hmong et Khorat Hmong, cependant le dernier, résidant au Laos, a disparu dans la nature. Prolongeant l’entente cordiale, Laspalès communique à ses homologues britanniques un rapport détaillé sur cette affaire.

La BMS organise ensuite discrètement le sevrage des notables infectés par l’opium noir à l’aide du remède, qui est administré avec assistance médicale. Seulement quatre morts sont à déplorer parmi la cinquantaine de personnes traitées. Quoiqu’il en soit, la commission parlementaire des affaires coloniales est purgée de ses éléments infectés et de nouveaux ordres sont envoyés au gouvernement colonial indochinois...

Car les agents de la BMS pensent que la menace de l’Opium noir n’est pas terminée pour autant car le site de production de la sève noire, c’est-à-dire le village Tcho-Tcho au Laos, est intact. Des négociations sont entreprises dans les semaines qui suivent avec le deuxième bureau pour entreprendre une action militaire contre ce village. Compte tenu de son accès difficile, il est décidé un bombardement aérien avec des bombes au gaz, tout comme les britanniques en font usage pour leurs opérations de maintien de l’ordre en Irak.

8 novembre 1926 : départ de Marseille d’un groupe d’agents de la BMS pour l’Indochine afin de participer aux opérations militaires contre le village Tcho-tcho. Le commissaire Laspalès a décliné la proposition que lui a fait le commissaire Conti de partir en personne pour l’Indochine, estimant qu’il a assez payé de sa personne et qu’il est désormais « trop vieux pour ces conneries » ! Même chose pour l’inspecteur-chef Rodier, qui après avoir hésité, a préféré lui aussi rester en France, épuisé nerveusement par cette enquête. Trois hommes seulement ont alors été désignés : l’inspecteur-chef Sarraut ainsi que les inspecteurs Bonfils et Chevalier, deux nouvelles recrues. Ils emmènent avec eux sur le bateau le FBA 17 de la BMS.

A leur arrivée à Saigon les hommes de la BMS prennent contact avec le capitaine de Rosay qui dirige le 2e bureau local. Conformément aux ordres de Paris, l’escadrille 571 équipée de Breguet 14 a été mise à leur disposition pour le raid, sur un aérodrome avancé à Savannakhet (Laos).

18 novembre 1926 : Le temps étant favorable, une reconnaissance aérienne est entreprise par l’inspecteur Sarraut emmenant l’inspecteur Bonfils en navigateur. Ils trouvent le village Tcho-tcho perdu au milieu de la jungle et perché sur une montagne en forme de pain de sucre, en bas duquel se trouve un lac. Forme sinistre, une porte sculptée à flanc de falaise constitue l’entrée d’un temple que les agents de la BMS soupçonnent d’abriter des horreurs Cthuloïdes. Ils observent quelques activités humaines sur le village, prennent des photos, et retournent à leur base.

L’après-midi a lieu l’attaque. Y participent les appareils suivants :

  Le FBA 17 de la BMS, avec pour pilote l’inspecteur chef Sarraut et comme mitrailleur avant l’inspecteur Sylvain Chevalier.
  Un moderne Breguet 19 de l’escadrille 571, à bord duquel a pris place comme mitrailleur navigateur l’inspecteur Bonfils.
  Quatre Breguet 14 de l’escadrille 571, à bord de l’un d’eux se trouvant à la place du mitrailleur le capitaine de Rozay.

Tous sont armés de bombes contenant des gaz toxiques, armes pourtant prohibées par la convention de Genève...

Suivant le Breguet 19 à bord duquel l’inspecteur Bonfils fait la navigation en se repérant avec le Mékong et ses affluents, la petite force aérienne arrive au village Tcho-tcho. Un à un, les appareils larguent leurs bombes remplies de gaz moutarde sur un point légèrement surélevé par rapport au village afin de permettre au gaz de redescendre sur le village. Malgré les perturbations rencontrées en volant à flanc de montagne, le bombardement est un succès et la plupart des bombes tombent au but, l’une d’elle est même larguée à l’entrée du temple. Plusieurs passes de mitraillage sont ensuite effectuées, et plus aucun mouvement n’est observé sur le village.

Tous les appareils font alors demi-tour, mais l’inspecteur chef Sarraut désire en avoir le cœur net et veut se poser sur le lac pour aller explorer le village à pied. Il l’explique par signe au Breguet 19, et se pose sur le lac situé au pied de la montagne. Il s’approche en hydroplanant du rivage proche de la montagne que scrute avec inquiétude l’inspecteur Chevalier, agrippé à la mitrailleuse de son poste d’observateur. Les cinq Breguet restés en l’air ont alors été témoins d’une terrible vision d’horreur : d’immenses tentacules noirs sont sorties des profondeurs du lac et se sont saisi de l’hydravion, l’entraînant dans les profondeurs avec ses deux malheureux occupants qui n’ont eu aucune chance de survie.

Rentrés à Savannakhet, les équipages des quatre Breguet 14 et du Breguet 19 sont très choqués et quelques uns d’entre eux doivent être placés dans un établissement spécialisé. Seul survivant du détachement de la BMS, l’inspecteur Bonfils rend compte de la situation à Paris. En accord avec le 2eme bureau du Colonel Collot, il est convenu de laisser la montagne du village Tcho-tcho en paix avec son abomination souterraine...

La BMS peut s’enorgueillir d’avoir mis fin à la plus grande organisation criminelle connue à ce jour utilisant le mythe de Cthulhu pour arriver à ses fins !

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