L’étrange machine du professeur Ravanel

Rapport de mission n° 10
Date de la mission: Août 1905
Agents :

La Brigade détruit une machine à remonter le temps construite sur une île bretonne par un savant fou financé par la Main Rouge.

Août 1905. Un rapport de police indique que dans le ville de Brest a été retrouvé le cadavre d’un citoyen britannique nommé Jack Saunders, qui a été retrouvé « vidé comme une mouche séchée au soleil ». Les circonstances de ce décès assez étrange conduisent à la Brigade Mobile Spéciale d’être saisie de l’affaire. Plusieurs agents montent dans le premier train pour la Bretagne...

Brest

Les agents se dirigent dès la sortie de la gare vers la brigade de gendarmerie pour prendre connaissance des éléments de l’enquête. Ils ont la surprise de tomber dans les bureaux sur un citoyen britannique qui bataille avec un gendarme, essayant de lui faire comprendre qu’il est un policier britannique. Des explications très polies ont lieu avec cet homme qui fait voir une carte de policier britannique et s’identifie comme étant l’inspecteur Dutton. Très courtoisement, il s’excuse de ne pas être passé par les voies officielles. Il explique être en France à titre privé et qu’il suivait discrètement ce Monsieur Saunders, qui est connu par Scotland Yard pour être un des hommes de confiance du professeur Moriarty ! Ce meurtre intéresse donc au plus haut point la police de sa majesté.

Les agents lui proposent de se joindre à eux dans leur enquête. Ils vont examiner le corps de Saunders qui se trouve dans un local de la brigade de gendarmerie de Brest. Sa conservation ne pose aucun problème car il est momifié ! A la vue de ce corps desséché, l’inspecteur Achénar Dumort pense à l’action d’une créature dont il a entendue parler avec ses amis de la Golden Dawn quand il était à Londres il y a dix ans, et que des ouvrages occultes désignaient sous le nom de « chien de Tindaloss ». Les autres agents restent un peu perplexes quant au savoir occulte de leur collègue.

Ils examinent ensuite avec Dutton ses effets personnels. On a trouvé sur lui un billet de bateau pour Portsmouth. Egalement un billet de train pour Quimper, composté. Il y a également les restes d’une mallette : il ne reste plus que sa poignée intacte, le reste étant comme bouffé par l’acide. Cette mallette semblait contenir, entre autres, un sac de graines dont il ne reste rien du contenu.

Au moment où les agents examinent les pièces, une bombe fumigène est lancée dans la salle. Deux individus masqués font irruption et tentent de voler les pièces à conviction ! Un violent pugilat s’engage et tourne au désavantage des assaillants, qui s’enfuient en criant « A moi la Main Rouge ! » Ils grimpent dans une voiture conduite par un complice et s’enfuient dans les rues de Brest, immédiatement poursuivis par les agents au volant de l’unique véhicule de la gendarmerie qui par chance se trouvait à proximité. La course poursuite, dans laquelle les agents ont de nombreuses frayeurs, se termine fort mal pour les cambrioleurs dont le véhicule fait une très violente sortie de route, les tuant sur le coup.

Certains agents sont tous tremblants de cette folle course poursuite qui a bien failli mal se terminer pour eux aussi. Dutton offre quelques rasades de Whisky de sa flasque pour remettre tout le monde de leurs émotions. Les corps des malfaiteurs prennent le chemin de la morgue et les agents, après s’être restaurés, poursuivent leur enquête.

Il est absolument impossible d’identifier les trois malfrats, qui ne portaient aucun papier et étaient inconnus de la police brestoise. Par contre, leur voiture est un précieux indice. Comme il n’y a pas tellement de voitures de Bretagne, il est possible de retrouver en interrogeant les rares concessionnaires qu’elle a été vendue à un certain M. Ravanel, habitant Kernezec sur mer, près de Concarneau... Les agents décident de s’y rendre le lendemain, accompagnés de l’inspecteur Dutton.

L’île du professeur Ravanel

A Concarneau, les représentants de l’ordre locaux reconnaissent la voiture que leur décrivent les agents de la BMS comme celle du professeur Ravanel, que l’on dit être un savant. Au village de Kernezec, ils découvrent que ce Monsieur habite sur une île où se trouve une vieille tour, une fortification construite sous le 1er empire, et qui a visiblement été rénovée. On y voit également une serre... et un canon !

Ils décident de lui rendre visite en louant un petit bateau. Ils accostent sur l’île avec grand peine, des domestiques armés de fusils de chasse leur faisant comprendre qu’il s’agit d’une propriété privée. Ce n’est qu’après avoir hurlé leur qualité de policiers qu’on consent à les faire débarquer... On les conduit à la tour au sommet de l’île, à laquelle ils accèdent en suivant un petit chemin qui serpente à travers une végétation qui est assez surprenante pour le climat breton ! Un solide « majordome » barbu, un irlandais roux qui se fait appeler « Mister Slugh », les conduit dans une serre où poussent des plantes encore plus étranges et où les attend le professeur Ravanel. Il leur offre à manger des fruits énormes et leur déclare mener des recherches dans le but d’aider l’humanité à se nourrir et chercher à éradiquer toute famine sur terre. Questionné sur sa voiture, il déclarera se l’être faite voler sur le marché de Concarneau. Les agents n’en n’apprennent pas plus et sont poliment reconduits à leur bateau, sans avoir pu visiter les lieux plus en avant. En descendant, certains agents remarquent une clôture métallique cachée dans les buissons, qui ceinture toute l’île... Etrange. Ils recensent environ une vingtaine de « domestiques ».

Revenus à Concarneau, ils découvrent qu’aucun vol de voiture n’a été déclaré. C’est alors qu’ils décident de retourner visiter l’île du professeur Ravanel dont le maître des lieux ne leur inspire guère confiance et qu’ils soupçonnent d’être un des chefs de l’organisation criminelle « La Main Rouge », bien connue de la BMS. Dutton fait remarquer que les « domestiques » ont comme un air anglais.... Ils partent donc le soir même pour une opération clandestine.

A travers le temps !

Alors que leur petit voilier navigue en silence dans la nuit, le canon du fort de l’île tire dans un nuage, faisant éclater un orage dans lequel ils sont pris. Un champ de force électrique se crée tout autour de l’île, un mur de lumière paraît sous l’eau. Le soleil se lève en pleine nuit puis bouge dans le ciel de manière surnaturelle, puis se couche en quelques secondes. Il se lève de nouveau et accomplit une autre révolution, puis d’autres de plus en plus vite au point de n’apparaître plus que comme une zébrure jaune dans le ciel. Quand tout s’arrête, il fait jour et le continent a complètement changé, y apparaissent des collines vertes avec une végétation luxuriante. On voit, à l’intérieur des terres, une construction en forme de dôme.
De derrière l’île sort un bateau qui va vers le rivage. Les agents de la BMS, à peine remis de leurs émotions, décident de le suivre discrètement en profitant des nappes de brume sur l’eau.

Sur le continent...

Le bateau des hommes du professeur Ravanel accoste dans une crique entourée d’une végétation luxuriante. Les agents décident d’accoster plus loin et de camoufler leur embarcation, puis ils s’enfoncent à l’intérieur des terres en tentant d’espionner leurs ennemis.
En se dirigeant vers le dôme qu’ils ont aperçu en mer, quelle n’est pas leur surprise de découvrir un magnifique jardin peuplés de jeunes gens légèrement vêtus et complètements insouciants, s’adonnant à la paresse au soleil en dégustant des fruits ! Les agents entament la conversation avec eux et ils arrivent à se faire comprendre, leurs interlocuteurs parlant une langue proche du français, ou plutôt un français évolué... Ces jeunes gens, qui disent s’appeler les Elois, ne sont pas très bavards ni curieux. On ne trouve aucun adulte âgé de plus de la trentaine parmi eux. Apparemment, leur nourriture est amenée par les « Morlocks » dont les agents de la BMS n’obtiennent pas plus de détails. Il semble que ces Elois ne savent pas lire ni écrire ! Ils offrent pourtant l’hospitalité aux agents, qui peuvent ainsi pénétrer dans le grand dôme. Ce bâtiment sert en fait de réfectoire et dortoir commun, dans une aile du bâtiment se trouvent plusieurs pièces qui permettent aux agents de faire plusieurs découvertes. Dans une pièce des objets futuristes laissés à l’abandon ; dans une autre des livres qui tombent en poussière, et dans une troisième de grands anneaux cuivrés ,de la taille d’un poing, dont les agents découvrent les curieuses propriétés. En les faisant tourner sur une table, on entend une voix venue de nulle par : c’est la forme futuriste des enregistrements sur cylindres de cire.

C’est par ce moyen que les agents découvrent le destin de l’humanité, raconté par plusieurs narrateurs. Dans un lointain passé (ou un lointain futur si on se place à l’époque des agents), des savants sont parvenus à force d’expériences à produire une plante merveilleuse qui donnait de gros fruits rouges. Cette plante pouvait pousser partout et sans nécessiter beaucoup d’eau. Les fruits qu’elle donnait, absolument délicieux, étaient très nourrissants et dotés de formidables propriétés curatives, rendant son consommateur très résistant aux maladies tout comme assez insensible à la morsure du froid. Cette plante, qui fut baptisée « Véfour » du nom d’un grand restaurant parisien, fut plantée partout et consommée à grande échelle. Elle fut le début de la fin de la civilisation. Les gens n’avaient plus besoin de travailler pour gagner de l’argent pour se nourrir, se soigner voire se loger ; certains vivaient à même la nature. Des communautés libres se formaient et la société se désagrégeait. Les ouvriers quittaient leurs chantiers ou leurs usines, les soldats désertaient leurs régiments, les services publics n’étaient plus assumés. L’humanité régressait à ses débuts, vivant dans de petites communautés tribales ! Le savoir scientifique disparaissait avec les derniers savants, qui ont réalisé le présent enregistrement.

Alors que les agents sont abasourdis par cette terrible découverte, une sirène retentit dans le lointain. Comme un seul homme les Elois s’y dirigent dans une sorte de ferveur religieuse ; les agents les suivent et découvrent qu’ils s’approchent d’un temple souterrain dont l’entrée émerge de la jungle. C’est un temple Morlock dont ils aperçoivent avec horreur quelques spécimens : une dégénérescence d’humain, au corps puissant et trapu, une peau bleuâtre et un visage grimaçant avec de grandes dents, des yeux rouges et une longue chevelure blanche. Les Morlocks saisissent une poignée d’Elois et les jettent dans leur temple souterrain. Les agents comprennent que leur régime alimentaire est le cannibalisme ! Ces Morlocks, vestiges d’humains civilisés, élèvent les Elois comme du bétail.

Alors que les portes du temple se referment, des coups de feu attirent l’attention des agents. Ils se dirigent vers l’endroit où ceux-ci ont été tirés en suivant un chemin qui serpente à travers la jungle et sur lequel ils remarquent la trace de bons vieux pneus Michelin ! En les suivant cette piste qui remonte dans le territoire Morlock, ils trouvent une petite clairière dans laquelle il y a eu un affrontement : quatre hommes de la Main Rouge ont attaqué un « camion » de trois Morlocks contenant des fruits dont du Véfour, sans doute allaient-ils livrer les Elois. Les hommes de la main rouge sont maintenant en train de charger en fruits leur petit véhicule, qui a sans doute été déchargé du bateau. Les agents de la BMS se ruent à l’attaque, motivés par le fait que le bateau de la main rouge est peut-être pour eux le seul moyen de revenir à leur époque. Des coups de feu claquent, des chevrotines font tomber des feuilles des arbres, et certains agents n’hésitent pas à charger au corps à corps, dont l’inspecteur Ange Vespérini qui envoie personnellement « Mister Slugh » ad patres. Tous les sbires de la Main Rouge sont tués au prix de quelques blessures légères chez les agents, qui après avoir viré les caisses de fruits s’entassent dans la voiture Peugeot et remontent le chemin vers la crique où accosta le bateau des malfrats.

Retour sur l’île.

Les agents abattent sans ménagement le sbire de la Main Rouge de faction et capturent le navire, avec lequel ils reviennent sur l’île sans dévoiler leur identité aux gardes qui s’y trouvent. A peine débarqués, ils se glissent dans la tour et parviennent à trouver une salle où se trouve une machine à remonter le temps, dont ils parviennent à comprendre le tableau de commande. Ils déduisent aussi son mode de fonctionnement : le professeur Ravanel a trouvé le moyen de commander une créature qui se joue de l’espace et du temps, nommée Chien de Tindaloss. Il en a fait enfermer plusieurs dans une sorte de caisson magnétique dont il tire l’énergie temporelle pour faire voyager toute son île à travers le temps, sacrifiant sans doute plusieurs créatures dans l’opération. Sans plus tarder, les agents actionnent la machine en sens inverse et le soleil se met de nouveau à tourner à grande vitesse sur son axe, l’île voyage dans le temps en sens inverse.

Ceci alerte le professeur Ravanel qui fait irruption pendant le processus, avec plusieurs de ses hommes armés jusqu’aux dents. Un combat s’engage dans la salle de la machine, entre les fils électriques et accumulateurs, jusqu’au moment où une balle perdue perce le caisson en cuivre qui contient les créatures (ou a affaibli le champ magnétique qui en assurait l’intégrité). Quoiqu’il en soit cela déclancha une vision d’horreur qui fit perdre la raison à l’inspecteur Achénar Dumort : plusieurs Chiens de Tindaloss s’échappèrent et les agents découvrirent avec horreur ces créatures quadrupèdes efflanquées, au corps recouvert d’une substance bleue et qui tirent une longue langue pointue. Alors que les deux camps se mettent à tirer sur les créatures sans grand effet d’ailleurs, celles-ci se ruent sur les hommes de la Main Rouge et le professeur Ravanel qui connaît une fin horrible. Toute l’installation électrique crépite d’étincelles et les agents de la BMS accompagnés de l’inspecteur Dutton ont le temps de fuir avant l’explosion finale qui engloutit tous les hommes de la Main Rouge ainsi qu’un agent, l’inspecteur De la Tour.

Fort heureusement, le processus de voyage dans le passé s’était terminé. Les agents se retrouvent dans la paisible nuit qu’ils avaient quitté avant cette aventure et peuvent revenir en bateau vers le village de Kernezec, où on ne s’est rendu compte de rien si ce n’est un coup de canon. Mais cela n’a pas inquiété les habitants outre mesure, ce sont les expériences du savant...

Les agents survivants rentrèrent à Paris après avoir laissé Dutton s’embarquer pour l’Angleterre. Ils firent ce qui s’avéra peut-être le rapport le plus étrange de leur carrière. Dans la précipitation, ils n’ont rien ramené de leur voyage dans le temps. Sauf peut-être un doute... Car Scotland Yard n’a jamais entendu parler d’un inspecteur Dutton !

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